LOI CONTRE LES RELATIONS INAPPROPRIÉES : VERS LE DÉVELOPPEMENT DE BONNES PRATIQUES DANS LA PROTECTION DES ENFANTS CONTRE L’EXPLOITATION SEXUELLE AU COSTA RICA

L’auteure, Diana P. Carvajal, est conseillère juridique volontaire déployée au Costa Rica dans le cadre du projet « Protection des enfants, femmes et autres collectivités en situation vulnérable» (PRODEF). Ce projet est mis en œuvre par Avocats sans frontières Canada (ASFC) et le Bureau international des droits des enfants (IBCR), grâce à l’appui financier d’Affaires mondiales Canada.

Le programme de coopération volontaire de l’IBCR me donne à cette occasion, la chance de contribuer au renforcement des compétences de notre partenaire au Costa Rica, la Fondation Paniamor. Mon outil de travail, le droit, m’accompagnera encore une fois dans ce parcours de 6 mois, où je serai basée à San José, et pendant lequel je me propose de concourir à mieux promouvoir les droits des enfants et adolescentes et à leur protection contre la violence, l’abus et l’exploitation.

Parmi ses projets d’intervention, Paniamor a accompli un important travail de plaidoyer en vue de l’adoption par l’Assemblée parlementaire du Costa Rica, de la Loi contre les relations inappropriées (LRI) [1]. Ainsi, le Code criminel du Costa Rica a été modifié de façon à prohiber les relations sexuelles et le mariage lorsqu’une différence d’âge entre les partenaires est susceptible de créer une asymétrie de pouvoir. Un de mes objectifs sera d’appuyer la mise en œuvre de cet outil particulièrement par le renforcement des compétences des autorités concernées en vue d’une application plus efficace de la loi.

Or, ces règles sont relativement récentes au Costa Rica et comportent un certain degré d’incertitude. Dans le but de contribuer à ce que la protection des enfants ne soit pas entravée, il est bien de commencer par dissiper quelques ambiguïtés. Un aperçu sur le contenu et une comparaison avec les prévisions du droit canadien à l’égard de la protection des jeunes contre l’exploitation sexuelle permettent de mieux comprendre la portée de la LRI.

Au Costa Rica, la règle générale interdit, en principe, les adultes de se livrer à des relations sexuelles avec une personne de moins de 18 ans [2]. Quant au droit canadien, en principe, seules les relations sexuelles avec des enfants de moins de 16 ans sont prohibées [3]. Toutefois, la législation des deux pays reconnait le besoin des jeunes de vivre l’apprentissage sexuel et, en conséquence, des exceptions régissant le consentement des enfants à des relations sexuelles ont été adoptées.

Les adolescents et le consentement à des relations sexuelles

La protection s’intensifie lorsque l’enfant est plus jeune. Au Costa Rica, les enfants de 12 ans et moins ne peuvent dans aucun cas consentir à des relations sexuelles [4]. Pour le Canada, cet âge a été fixé à 11 ans et moins [5]. En revanche, les adolescents gardent la possibilité de consentir à des relations sexuelles au fur et à mesure que son développement physique et intellectuel augmente.

À cet égard, la législation costaricienne apparait un peu plus permissive que la législation canadienne. Ainsi, lorsque l’enfant est âgé de plus de 13 ans et moins de 15 ans [sic], la LRI interdit les relations sexuelles avec un partenaire qui est de cinq ans et plus son aîné. Dans le cas des adolescents de plus de 15 ans et moins de 18 ans, la prohibition se relâche un peu, en permettant un âge maximal de six ans de différence entre les partenaires [6]. Cette formulation crée un doute pour les enfants de 13 ans qui semblent exclus de la première catégorie et pour les enfants de 15 ans qui pourraient être dans l’une ou l’autre ou dans aucune d’entre elles, selon l’interprétation du juge. Les restrictions sont plus serrées en droit criminel canadien où, les enfants âgés de 12 et 13 ans ne peuvent consentir à des relations sexuelles qu’avec un partenaire qui est de moins de deux ans son aîné. Quant au consentement de l’enfant âgé de 14 ou 15 ans, il peut être valable, pour autant que son partenaire soit de moins de cinq ans son aîné [7].

Dans tous les cas, la LRI prohibe les relations sexuelles lorsqu’il y a un lien de parenté qu’il soit par consanguinité ou par alliance et lorsque le partenaire est en situation d’autorité et de confiance par rapport à l’enfant [8]. Au Canada, le consentement des enfants et adolescents, même âgés de 16 et plus, ne constitue nul moyen de défense pour une personne en position d’autorité ou de confiance [9].

La phase de mise en œuvre

Les indubitables avancées du droit costaricien en matière de protection des droits des enfants sont à saluer. Le défi dans la prochaine étape sera de surmonter les obstacles, autant dans l’interprétation de la Loi, que dans l’attention des enfants victimes d’exploitation sexuelle. La priorité dans mon agenda sera d’appuyer les organismes de l’État dans la définition des compétences permettant la mise en œuvre de la Loi en vue d’épauler le changement social auquel l’IBCR souhaite contribuer.

[1] Costa Rica, Loi No. 9406 du 30 novembre 2016, modifiant le Code Criminel, le Code de la famille et le Code Civil entre autres normes, Assemblée législative du Costa Rica, (Entrée en vigueur: 13 janvier 2017) [LRI].
[2] Ibid., art. 1 et 2
[3] Code Criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, art. 151 et 152 [CCr].
[4] LRI, art. 1.
[5] CCr, art. 150.1 (2). 
[6] LRI, art. 1 (1) et (2).
[7] CCr, art. 150.1 (2) et (2.1).
[8] LRI, art. 1 (3).
[9] CCr, art. 153.