Bienvenue à Martin Causin, nouveau directeur général de l’IBCR !

2022 annonce un nouveau chapitre pour le Bureau international des droits des enfants, qui accueille un nouveau directeur général. C’est Martin Causin, anciennement chef de projet au Burkina Faso, puis représentant régional Afrique pour l’IBCR depuis 2020, qui relève ce défi depuis le mois de janvier. Il prend la suite de Guillaume Landry, appelé vers de nouveaux horizons après avoir œuvré pour l’IBCR pendant plus de 15 ans. Apprenezen plus sur son parcours et sa vision dans cette courte entrevue. 

Propos recueillis en janvier 2022.

 

Titulaire d’une maîtrise de l’Université Catholique de Louvain en Belgique, Martin Causin a mené toute sa carrière en direction et gestion de programmes. Il passe sept ans au Burkina Faso, en tant que représentant pays pour ADJAO, où prend racine son engagement en faveur des droits de l’enfant, notamment dans son travail de facilitation de l’accès au sport et aux loisirs pour les jeunes les plus défavorisés. 

Martin a rejoint l’IBCR en 2017 avec la volonté de contribuer au développement de systèmes de protection de l’enfant adaptés et respectueux de leurs droits. Après quatre années en tant que chef de projet au Burkina Faso, il devient le représentant régional de l’IBCR en Afrique. Cette dernière fonction, axée sur le développement de projet et sur la coordination de nos actions en Afrique, a été un tremplin vers la direction générale du Bureau, fonction occupée par Martin Causin depuis janvier 2022. 

Dès le début de votre carrière, vous avez travaillé sur des projets visant à améliorer l’accès à la justice des femmes et des enfants, ainsi que sur des projets en matière d’éducation. D’où vous viennent cet intérêt et cette sensibilité pour les droits de l’enfant ? 

Martin Causin (M.C.) : Avant de développer une sensibilité pour les droits de la personne et de l’enfant, j’ai d’abord eu une attirance pour le continent africain. Au milieu du cycle d’école secondaire, j’ai eu la chance de partir au Burkina Faso pour un séjour d’échange, qui a été le point de départ de mon engagement. J’ai été sensiblement impacté par les relations que j’ai eu la chance de tisser sur place, et j’ai développé un intérêt fort pour un certain nombre d’enjeux liés au développement. Juriste de formation, j’ai été très vite interpellé par des questions liées à l’éducation et au respect des droits. Au début de ma carrière, je me suis rapidement focalisé sur ces aspects-là, et avec plus de 50 % de la population africaine âgée de moins de 18 ans, les enjeux liés aux droits de l’enfant ont automatiquement pris une place importante dans mon travail. 

 

Vous avez récemment été nommé directeur général de l’IBCR. En quoi ce nouveau défi professionnel vous stimule-t-il particulièrement ? 

M. C.: Les hasards de la vie font souvent bien les choses. Lorsque j’ai rejoint le Bureau en tant que Chef de projet, je ne m’imaginais pas quelques années plus tard occuper le poste de directeur général. C’est lorsque le projet s’est terminé et que j’ai pris mes fonctions en tant que représentant régional Afrique que mes intérêts se sont petit à petit tournés vers des aspects plus stratégiques. Ces deux postes m’ont donné l’occasion de faire face à la fois aux défis des activités sur le terrain et aux enjeux de coordination et de développement des activités du Bureau. Ce qui m’a également poussé à m’impliquer dans ce nouveau défi, c’est que je crois fondamentalement aux résultats visés par nos projets à l’IBCR, notamment parce que j’ai eu l’occasion de les constater réellement sur le terrain, notamment au Burkina Faso, en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire ou encore en Tunisie. Le fait de ne pas délivrer nous-mêmes des services aux enfants, mais d’accompagner celles et ceux qui étaient sur le terrain avant nous, qui sont sur le terrain pendant nos projets et qui y seront encore demain pour veiller au respect des droits des enfants, c’est une philosophie qui me parle et que je suis fier de représenter en prenant ce poste. Renforcer structurellement les systèmes de protection de l’enfant en misant sur des compétences-clés adaptées à chaque acteur et à chaque contexte, c’est une approche que je souhaite poursuivre et développer. 

 

En tant que directeur général, quelles sont vos orientations quant aux priorités du Bureau ? 

M. C. : Ma boussole, c’est le plan stratégique du Bureau. Il reflète ce que l’on fait déjà aujourd’hui, mais met aussi l’accent sur deux piliers sur lesquels nous avons une marge de progression, soit davantage écouter et mieux impliquer les enfants en tant que sujets de droits et la mobilisation des actrices et acteurs de changement. Cela veut dire deux choses; d’abord, s’élever à la hauteur des enfants et les outiller pour les rendre responsables et acteurs de leur propre protection et sur la façon concrète dont elles et ils peuvent le faire. Ensuite, cela implique aussi de renforcer les capacités d’une plus grande variété d’acteurs du système de protection de l’enfant afin que d’une part, ils puissent mieux remplir leur rôle de protection de l’enfant, mais aussi, d’autre part, qu’ils intègrent dans leurs pratiques le fait que les enfants sont précisément des actrices et acteurs de ce système de protection tout comme eux. Je pense que c’est là-dessus qu’on doit mettre l’accent. Enfin, je souhaite aussi améliorer l’analyse de l’impact de notre action auprès des enfants, dans les différents pays dans lesquels nous sommes intervenus. 

 

Selon vous, dans les prochaines années, quels sont les principaux enjeux qui impacteront les droits de l’enfant à travers le monde ?  

 M. C.: Dans plusieurs de nos contextes d’intervention, notamment dans les pays du Sud, la démographie progresse, la moitié de la population a souvent moins de 18 ans, ce qui signifie que davantage d’enfants risquent de se trouver face à des situations dans lesquelles leurs droits sont bafoués. Pour faire face à cela, les systèmes de protection doivent continuellement s’adapter et se renforcer, et les acteurs qui le composent doivent être adéquatement formés et outillés pour protéger et accompagner ces enfants, tant pour faire face à cette recrudescence qu’aux nouvelles formes que ces violations peuvent prendre. On constate par ailleurs une hausse de certaines violations des droits de l’enfant liées à des contextes géographiques spécifiques, par exemple aux déplacements de populations ou encore aux situations d’urgence – que ce soit climatique, humanitaire ou sécuritaire. Ces situations instables révèlent un défi majeur : s’assurer que celles et ceux chargés de protéger les enfants au quotidien possèdent les compétences nécessaires pour s’adapter à ces contextes spécifiques. De plus, au Canada comme ailleurs, la pandémie que nous vivons a un impact considérable sur les enfants et leurs droits, accentuant notamment les risques de violences et d’exploitation à leur égard, avec des services de protection moins accessibles et un isolement plus grand. La combinaison de ces enjeux annonce bien des défis, que le Bureau s’attachera à relever pour garantir à chaque enfant un meilleur accès à des services de protection de qualité et adaptés à leurs droits, et de vivre et grandir dans un environnement sécuritaire et épanouissant.   

 

L’arrivée d’une nouvelle direction est souvent synonyme de changements. Quel élan souhaitez-vous donner au début de votre mandat ? 

M. C.: Je tiens d’abord à remercier Guillaume Landry pour tout le travail qu’il a abattu avec et pour le Bureau. Je prends la tête d’une structure saine et avec de belles perspectives sur plusieurs années. Il y a une dynamique très positive qui se ressent dans la façon dont l’IBCR vise à atteindre ses résultats et ma volonté est d’abord de le diriger dans une approche de continuité. Bien sûr, j’ai fixé plusieurs priorités pour le début de mon mandat. Premièrement, celle de stabiliser la mise en œuvre de nos projets actuels, dans un contexte de croissance de l’organisation et d’évolution constante des situations vécues par les enfants. Une de mes priorités sera donc de veiller à ce que l’on garde notre ADN de bureau d’expertise technique, tout en s’adaptant au monde dans lequel vivent les enfants. Deuxièmement, au vu du contexte pandémique, qui impacte nos activités depuis presque deux ans déjà, il est nécessaire d’avoir une grande capacité d’adaptation opérationnelle – ce que le Bureau a déjà démontré – et d’être créatif sur la façon de répondre aux besoins de nos partenaires et surtout des enfants. Je souhaite donc renforcer cette capacité à adapter nos approches lorsque cela s’avère nécessaire. Troisièmement, je souhaite que l’action du Bureau s’engage encore davantage à valoriser et mobiliser les acteurs du système de protection de l’enfant moins considérés, afin qu’ils soient mieux intégrés et interagissent de façon complémentaire avec les secteurs plus traditionnels de ces systèmes. Je pense bien sûr aux enfants eux-mêmes mais aussi à la société civile, au secteur informel, au secteur privé, ou encore à des secteurs étatiques plus spécifiques. C’est en mettant au cœur du système un plus grand nombre de secteurs trop souvent négligés et en créant des connexions fortes entre l’ensemble de ses composantes, que l’enfant verra ses droits mieux respectés et aura accès à des services adaptés et de qualité. Enfin, je souhaite que le Bureau puisse accentuer son travail au Canada, notamment afin d’appuyer la mise en œuvre du droit à la participation de l’enfant, afin de le renforcer dans son statut de sujet de droits. Une volonté illustrée par notre projet « Parole aux jeunes », lancé en 2021 au Québec, qui donne la parole aux adolescentes et adolescents, afin qu’ils influencent les stratégies de prévention et d’action contre l’exploitation sexuelle.  

Au-delà de ces priorités, l’objectif de l’année 2022 est de renforcer la mobilisation du Bureau dans la recherche de solutions innovantes, pour nous élever à la hauteur des enfants et créer un monde dans lequel chacun d’entre eux jouit de ses droits en toute égalité et en toute circonstance. Notre projet de coopération volontaire PRIDE illustre bien cette volonté d’innovation qui me tient à cœur, en mettant la collaboration au cœur de la coopération et en créant un réseau international d’échanges et de partages d’expériences favorisant de nouvelles approches et des solutions innovantes afin de faire progresser le respect des droits de l’enfant au Canada, en Afrique et en Amérique latine.

En savoir plus sur le parcours de Martin Causin